Contrairement à nos autres sens, le toucher n’est pas traité par une aire spécifique de notre cerveau, mais partout. Il occupe une surface tellement plus grande que les 4 autres qu’il est comparable au Soleil qui pèse à lui seul plus de 90% de la masse de tout le système solaire. Il doit donc être au centre de notre système sensoriel, les autres ne font que lui tourner autour sans que nous nous en apercevions.
Et nous ne nous en apercevons pas parce qu’il est trop loin. Beaucoup plus lourd que les autres, il doit y avoir une grande distance avec les autres plus légers pour qu’ils puissent échapper à la puissance de la force d’attraction qu’il exerce et ainsi éviter d’être absorbés.
Le modèle marche bien. Il suffit d’attribuer une masse en fonction de la surface de cerveau occupée par les sens pour que le système se mette en place tout seul, avec un résultat qui correspond à ce qu’on observe. Il passe l’épreuve si facilement qu’on n’en perçoit pas la limite. Il faut donc pousser plus loin pour la trouver.
Selon ce modèle, chacun et chacune de nous serait une étoile/toucher autour de laquelle tournent des planètes/sens. Et la société deviendrait donc une galaxie. Un amas d’étoiles qui tournent toutes ensemble autour d’un centre. On sait maintenant que c’est un trou noir.
Le modèle ne fonctionne qu’avec un trou noir au centre. Ce sont des monstres, les trous noirs. Ils dévorent tout ce qui passe à leur portée, ce sont des ogres qui bouffent leurs enfants. S’il y en a un dans notre cerveau, c’est le lieu de tous nos cauchemars.
Et il y en a bien un qui correspond à cette description. Si nous nous sommes trompés et que nous avons mis la vue au centre à la place du toucher, c’est peut être parce qu’ils se ressemblent. La rétine est si riche en neurones qu’elle peut être considérée comme un petit cerveau relié au gros à elle seule.
Elle y est reliée par un câble, le nerf optique. L’endroit où il est connecté à la rétine est le seul où ne se trouvent aucun capteur, ni cône, ni bâtonnet. Autrement dit, c’est un trou noir. Un véritable trou noir dans l’image dont on n’a aucune idée qu’il existe avant d’avoir pris une feuille avec un point et une croix tracés dessus, et d’avoir vu la croix disparaître pour être remplacée par le quadrillage de la feuille à une certaine distance quand on fixe le point. C’est de la sorcellerie.
Le petit cerveau déporté qu’est la rétine s’organise donc bien autour d’un trou noir. Le gros aussi. Il y a également un câble énorme qui plonge sous la surface pour aboutir à notre cervelet en plein milieu de notre crâne. Un endroit d’où les informations en provenance de notre corps remontent. Il n’y a pas de capteurs reliés à l’extérieur à cet endroit, pas même au toucher qui est pourtant présent partout, il n’y a que du câble.
Nous avons donc aussi un trou noir dans le cerveau. Et nous savons où il mène : au cervelet. C’est lui qui se trouve à l’intérieur trou noir. Un endroit où les lois de la surface n’ont plus cours. Les lois de la physique ne sont pas les mêmes d’un côté et de l’autre de l’horizon des trous noirs.
Rien n’empêche par exemple que ce soit pour tout le monde le même. Que les étoiles toutes différentes les unes des autres que nous sommes, dont les planètes ne tournent jamais exactement à la même distance que celles des autres, tournent toutes autour d’un trou noir unique relié à chaque individu, dont chaque être vivant constituerait le point d’arrivée d’un câble qu’on ne perçoit pas parce qu’il est câble et non capteur.
Même poussé à sa limite, le modèle tient. Il fait réfléchir, on dirait un miroir.